Comment bien communiquer avec soi ?

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"Straw Patterns" by David McEachan/ CC0 1.0

Hier, je demandais, « comment allez-vous ? » Question sociale qui n’appelle pas vraiment de réponse et que nous n’osons pas souvent nous adresser à nous-même. Pas facile de bien communiquer avec soi. Et d’ailleurs, est-ce qu’on sait s’écouter à bon escient ? Car lorsque je cause si souvent d’assertivité, quelle attention je me porte, comment je communique avec moi-même ?

Tu t’écoutes trop

Dans une tradition où les mots de courage, sacrifice, engagement, service, responsabilité ont malgré tout marqué mon éducation, la vie a été souvent ponctuée de « devoirs ».

Le travail a été le marqueur fort de ma vie (de sa première partie au moins !) . Non qu’il m’ait ennuyé, mais il était posé comme une priorité ouvrant ensuite la voie du loisir… Il a pu largement empiéter ma vie privée…
Par le hasard des contraintes de la vie familiale, même si j’ai beaucoup appris grâce à cela, j’ai eu à gérer très tôt des responsabilités qui « n’étaient pas de mon âge ». J’ai réussi à me sauver grâce à des espaces de création. Il n’empêche, je n’ai pas eu une enfance très rigolote et l’adolescence fut douloureuse.

Le conformisme ne venait pas tant de la sphère familiale que d’une pression sociale très forte. On était prié d’entrer dans le cadre, d’être discret, « respectable » y compris dans ses relations amoureuses… Quand on signait un bail, c’était pour occuper les lieux en « bon père de famille ». Quand on passait un concours de la fonction publique, le maire devait signer un certificat de moralité.

Du coup, bien souvent, non seulement, il ne fallait pas trop s’écouter mais si besoin se cacher, se cacher à soi-même.

S’écouter, reste encore pour beaucoup, chouiner sur soi. C’est pas très bien vu. C’est affaire de chochottes.

Pour s’écouter certains ont parfois besoin d’un tiers.

Jeune homme, j’étais allé voir un analyste. Le pauvre gars fut à ce point déstabilisé qu’il commit la faute professionnelle de vouloir confier mon analyse à un confrère. J’en conclus à l’époque qu’il faudrait me démerder par moi-même…

Passer outre

Un certain nombre d’évènements douloureux surgirent, pour ne pas avoir à m’écouter, je passais outre. Par exemple à la mort de personnes qui ont compté pour moi, je me suis à peine arrêté et parfois pas du tout. Non par égoïsme mais au contraire, pour ne pas céder à la tristesse du deuil et prendre le risque de me fragiliser face aux autres, à la vie de tous les jours.

Je me suis souvent nié pour avancer. Et au fond de moi, il doit bien rester quelque chose de cette austérité, puisque j’ai strictement interdit toute cérémonie, célébration ou réunion pour ma propre mort.

Autocritique

Jamais je n’oserais le quart, le dixième des critiques que je m’adresse à autrui. Des fois c’est drôle tellement j’ai pu être implacable avec moi-même et ne pas me ménager dans l’autocritique. Ce fut assez remarquable pour que certains toxiques qui passaient par là le mesurent et s’emparent de cette faille.

J’ai souvent dit que je fonctionne aujourd’hui « sans honte ni orgueil »… mais je commence à peine après soixante ans, à oser être fier d’une réalisation, d’une création ou simplement de ce que je suis et de mon parcours. Et encore, je le fais avec prudence et serais vite prompt à me disqualifier.

Je ne vous dis même pas pour ce qui est de l’image physique !

En réalité, l’autocritique virulente a souvent été une façon de ne pas entrer en contact avec moi-même, une sorte de stratégie d’évitement.

Tu n’es pas obligé d’aimer tous les autres pour t’aimer mais t’aimer va t’aider à bien aimer les autres

l'amitié est précieuse
« Friends Hugging » by Helena Lopes/ CC0 1.0

Ou plus précisément, il n’est pas pertinent de faire passer les autres avant soi.

Sur l’éducation, sans revenir sur ma vie (allez-voir les nouvelles crues !) je dirais qu’être parent, suppose la capacité d’aimer ses enfants et de le prouver en actes positifs, aidant à leur émancipation.

Doué de langage, pour beaucoup grâce à ma mère et son respect absolu de la personne, j’ai pu me construire dans une certaine autodidaxie mais avec les aléas de l’empirisme. Je ne sais toujours pas faire mes lacets correctement et mes émotions parfois sont envahissantes !

Monsieur l’inspecteur

Quand un ex toxique voulait me piquer, il me renvoyait à cette image particulièrement stéréotypée de mon dernier métier. L’inspecteur est souvent vu comme une sorte de robot administratif placé dans une chaîne hiérarchique. Cette image sociale était si prégnante qu’il fallait que je porte costume et cravate.

Des collègues en fin de carrière, des enseignants, furent très étonnés de découvrir que je puisse écrire de la poésie ou des chansons !

Pour survivre, j’ai souvent posé des cloisons étanches entre mes mondes professionnels et la sphère privée, mais il vint un temps où cela était plus douloureux qu’autre chose. D’ailleurs, dans mes différents métiers, j’ai été « bon » lorsque j’ai pu « être moi – même », imprimer ma marque, instiller une part d’originalité, faire autrement…

Un petit garçon extraordinaire

Tous les enfants sont merveilleux. Mais j’étais un petit garçon extraordinaire. Vraiment chouette. Très inventif, très joueur avec les mots, aux amitiés indéfectibles, aux premières amours intenses, plein d’humour. Je sus lire très tôt et très tôt je lus des histoires de grand. J’ai très vite compris que les adultes mentent mais qu’ils croyaient aussi n’importe quoi. D’où le goût pour les histoires ou les contes imaginés pour les petits cousins. Je ne vais pas développer mais vraiment quel enfant attachant et comme il s’en est bien tiré ! Compte tenu de divers aléas, j’aurais logiquement pu finir fou ou suicidé, rater tous mes examens et me retrouver à la rue… mais je me suis non pas démerdé, mais sorti d’affaire et élevé en me respectant. Grâce aussi à de magiques rencontres parfois improbables mais marquantes. Et les moins agréables, m’ont formé et enrichi aussi…

Vincent à 5 ans un chouette môme

Il y a ce travail de dialogue, de lien avec sa propre enfance, en toute subjectivité, avec les émotions… mais ce bonheur d’être en lien avec soi, de s’élever, d’être fidèle à ses valeurs, de ne pas faire honte à l’enfant que j’étais, de savoir se relever et d’oser retrouver ou garder sa dignité…

Communiquer avec soi ?

Il y a le corps qui parle.

J’ai appris à écouter les signaux d’alerte comme les acouphènes ou l’insomnie.

Les petites douleurs chroniques sont bien souvent des messages utiles à se comprendre.

Je ne prends plus de Doliprane quand j’ai des migraines. J’apprends à accueillir celles-ci, de plus en plus rares, comme des signes d’un « trop de » ou d’un « pas assez de » et je m’autorise à prendre du recul, du temps, m’extraire, repérer une cause et je m’envoie en quelque sorte des messages d’apaisement. Et ça marche !

Écouter son corps, c’est manger quand j’ai faim, mais avec la vraie sensation de faim et si soudain je me goinfre, pouvoir m’interroger sur ce signal…

Il y a la marche à pied : avec d’abord un premier temps où toutes sortes d’idées vont se déverser. J’appelle ça « vider la poubelle » : pensées idiotes, négatives, évocations de mauvais souvenirs qui remontent à la surface, souvenirs d’attitudes pénibles ou d’agressions…

Puis vient le moment où je mesure que le plus souvent j’ai su dépasser l’épisode et je peux en rire ou en faire un texte… ou alors s’il s’agit d’inquiétudes envahissantes, que je saurais les traiter le moment venu dès lors que j’aurais « fait le job » c’est-à-dire en étant sincère, réactif sans céder trop à mes pulsions perfectionnistes.

Enfin, vient le moment où je me laisse traverser par le présent et ses sensations. C’est ce que j’appelle « vivre en poésie ». Je me relie au chemin, aux arbres, à l’environnement que je regarde vraiment, aux animaux ou aux personnes qui marchent près de moi…

J’ai encore du mal à effectuer de véritables méditations sans bouger…

Parfois je « vide la poubelle » aussi en écrivant une chanson, un texte… et je peux rire avec bienveillance de ce qui sort !

La lecture de poèmes permet d’aller se rencontrer dans l’inattendu d’une métaphore.

Car communiquer avec soi, c’est accepter l’inattendu : tiens, j’ai bien aimé cette rencontre, tiens j’ai été ému par telle situation… j’ai besoin de trouver de l’apaisement, de mettre des mots sur un évènement…

Entre intuitions, alignement des planètes, flow et distorsions cognitives

Je sais que je peux me tromper. Mais sur un certain nombre d’intuitions, si je m’écoute vraiment, mon expérience me permet de dire que je suis sur un chemin qui répondra à mes attentes, où je vais savoir d’adapter et trouver des réponses.

Pour un certain nombre de décisions importantes ou de choix dans ma vie, je sais repérer quand « les planètes sont alignées », que je suis là où je dois être en fonction de mes besoins, de mes valeurs…

Être dans le flow, c’est ce moment où tout converge entre ce que je fais, je pense et je ressens dans une dynamique constructive et centrée sur un objet. Je suis dans le présent, à la tâche et je m’y réalise. C’est une affaire d’énergies bien arbitrées, de « bon moment »… Il faut parfois se pousser, se refuser à la procrastination (mais ça c’est rare chez moi), parfois être patient dans la réalisation. Cela veut dire, à la fois se donner des défis et poser ses limites. Ne pas se mettre en danger tout en refusant de rester dans une zone de confort qui est plutôt une zone d’enfermement pour moi…

Mais bien sûr et surtout quand on est un autodidacte, c’est savoir qu’on peut se bercer d’illusions ou manquer de rationalité. Je peux m’accueillir avec bienveillance dans le fait que j’ai un sens de l’orientation assez mauvais si je m’accroche à la carte… bien meilleur si je regarde autour de moi et me fie pour part à non pas un « instinct » mais à mon expérience…

Communiquer avec soi-même devrait s’apprendre à tout âge

Ce n’est pas juste savoir « comment on se sent » mais « comment on se sent pour s’engager sur telle ou telle mission de vie ? » Et si cette mission correspond à un besoin, va me permettre d’avancer, de m’élever, d’apprendre et comprendre quelque chose… tout en me respectant.

C’est accepter qu’une chose puisse être difficile (pour moi) et repérer où et comment s’aider et se faire aider. Je veux bien communiquer avec moi, comme on se prépare à aller vers les autres, à la rencontre !

Vincent Breton

Par Vincent Breton

Vincent Breton auteur ou écriveur de ce blogue, a exercé différentes fonctions au sein de l'école publique française. Il publie également de la fiction, de la poésie ou partage même des chansons !

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