Oui ce matin, après une grasse matinée autorisée par les animaux jusqu’à 5h45, je me suis levé, de si bon pied de si bon œil. J’ai cru que nous étions lundi. Ça ne devrait rien changer pour moi. Pourtant je me suis retrouvé dans cette sensation double : une impatience contrariée, du temps retrouvé. C’est donc dimanche, alors je peux goûter plus avant ma liberté.
Notre Drame
Hier j’avais d’autre choses à faire et à penser qu’admirer le sacre de Macropoléon. Au moins j’ai vu un joli film humaniste. Vous ne m’aviez pas vu aux jeux nationalistes, je n’étais pas à la messe. Il n’empêche que cinq minutes de télévision ce matin suffirent pour m’imposer la soupe infâme d’un chanteur de variété massacrant consciencieusement une chanson de ce pauvre Léonard Cohen. Ah, oui, j’ai vu aussi Macropoléon dans une folle étreinte sensuelle avec un vieux blond raciste venu d’Amérique. La scène étant insoutenable, j’ai fermé la télévision.
J’avoue, je préfère largement Notre-Dame de Villefranche de Rouergue. Mon émotion est bien plus forte ici que sur le parvis parisien. Je ne sais pas si je retournerai un jour à Paris. C’est la ville où je suis né, mais je n’y ai plus que des amis et des souvenirs.
Je ne sais pas pourquoi je suis rétif à ces mises en scène obligées, cette débauche de vulgarité, cette récupération indigne. J’ai lu sur un réseau social les propos d’un type que j’ai cru d’extrême droite : non, c’était juste ceux d’un ancien premier ministre en pleine dérive, complètement noyé dans l’idéologie nationaliste d’inspiration « catholique ». Répondre ? Non. Inutile.
Je préfère donner mon énergie à ce que j’aime.
La dictature du stress
Depuis juillet, la classe politique n’a rien compris, rien appris. Je crois que c’est plié. C’est mensonges à tous les étages. Il n’y a pour l’heure aucun espoir de porte de sortie possible. Ils sont désespérants. Je reste poli. C’est vraiment un petit théâtre où le ridicule des uns se dispute à l’impéritie et l’orgueil des autres. Ce n’était pas tellement mieux avant. Les événements agissent comme des révélateurs. Je n’attends rien ni des uns ni des autres.
Mais ce serait facile de rejeter la faute sur les politiques. Les citoyens laissent faire. Ils scrollent sur leurs écrans attendant le prochain buzz. Le feuilleton est mauvais. Ils en redemandent. Une soif de pire.
Ce que je ne veux pas en tout cas, c’est céder à la dictature du stress qui est une façon de nous maintenir en dépendance, de nous faire accepter l’intolérable. L’époque du COVID a bien montré notre capacité collective à accepter l’asservissement. Le conditionnement fonctionne à merveille. Mais en même temps, chacune et chacun fait comme il peut, avec ce qu’il a, son ressenti, son histoire, sa vie…
Résister pour moi s’inscrit dans un double mouvement. Le premier c’est s’éloigner. S’éloigner du flux médiatique, de ce que les réseaux déversent… Il me suffit de m’éloigner un peu du journal télévisé pour mesurer quand j’en vois des bribes à quel point il n’est plus qu’un outil de manipulation. Le journalisme est quasi mort. Ou en tout cas, ceux qui font vraiment leur travail n’ont pas accès aux « grands médias ». Je crois que je vais me tourner de nouveau vers les journaux papier. Je dois me policer pour refuser d’entrer dans les provocations aussi vaines qu’inutiles des réseaux. Dans un second mouvement, c’est habiter plus avant encore la « vraie vie », la poésie de la vie, la rencontre patiente avec les gens d’ici qui sont multiples et n’ont rien à voir avec ce que les médias montrent. Le réel est autrement plus nourrissant. Dans ce réel j’inclus les arts, les paysages, l’activité humaine…
Vexé comme un pou
Hier, j’ai aimé aller au cinéma. Je redécouvre ce plaisir né quand j’étais jeune homme. À Paris, c’était au moins l’avantage, on pouvait trouver presque à toute heure, un film plaisant à voir. Ici, les salles sont moins nombreuses, mais fréquentées tout de même et je commence à m’y faire des habitudes.
Ce qui m’a vexé c’est de découvrir en lisant mon billet qu’on m’appliquait le tarif des plus de soixante-cinq ans sans que je ne demande rien. Merde alors ! Autrefois je paraissais plus jeune que mon âge. Me voici paraissant plus vieux de façon si évidente qu’on m’applique directement le tarif « vieillard ». Et c’est vrai, j’ai vu ce visage fatigué dans le miroir… Ahhhh…
J’ai économisé un euro, même deux. C’est ce que me dit encourageant, un ami au téléphone. Ce n’est pas la première fois qu’on me range au rayon « vieille croute » mais cela m’enfonce un peu plus dans la décrépitude. Mon apparence n’est plus raccord avec ce que je ressens, j’éprouve, ce que je croyais pouvoir être aux yeux des autres. J’ai vécu ça comme une humiliation, ce n’était que de l’orgueil. La dame n’a pas fait ça par méchanceté. Mais bon, quand même. Voilà, je suis vieux. Les gens ne me demandent plus si je suis retraité. Ça se voit. On a beau entendre des discours lénifiants, la vieillesse physique, la dégradation des corps, cet effondrement est visible.
Des amis, plus jeunes, tentent de me rassurer. Ce qui a l’effet inverse. Je ne m’étais jamais projeté jeune dans ce vieillissement. On prépare aux changements liés à l’adolescence… mais très peu à ceux liés à la vieillesse ou alors juste pour m’offrir une coloscopie le jour de mon anniversaire comme ma mutuelle. Au demeurant je ne suis jamais malade. Je suis en forme. Bon, si jamais la machine se dézinguait, j’ai déjà dit que je suis contre tout acharnement. Lutter contre la douleur oui, faire gonfler le déficit de la sécu, non.
C’est amusant, au moment où j’écris ces lignes, Galou, mon vieux chien qui a dépassé l’âge auquel les grands chiens sont censés « rendre l’âme », ce cher ami vient me chercher frétillant pour jouer à la balle. Il insiste, mais il fait encore nuit ! Je lui explique qu’il faut attendre. La patience n’est pas son fort, comme pour moi… Il est vraiment drôle lui, on dirait qu’il veut « bouffer la vie », réclame des ballades malgré son arthrose et son souffle court. Il hume tout, dévore son assiette, veut jouer et communique comme jamais avec la chatte. Il ne se prive pas d’aller au contact des plus jolies chiennes que nous croisons et de montrer sa joie dès qu’il le peut. Une détermination épatante. Un sacré exemple. Un vrai « coach » désintéressé en plus…
Au programme ?
Il faut que j’aille voir la dernière vidéo d’Elliot sur « le secret biologique qui ruine votre productivité ». Pour le coup la formulation fait un peu coach du commerce… mais je trouve les récits de ce garçon roboratifs. Il doit avoir vingt ans, ne vient jamais nous dire qu’il a de hautes potentialités, pourtant c’est une personne dont le cerveau carbure à mille à l’heure, dont l’intelligence pétille et les expériences dont il témoigne sont épatantes. Nous avons eu déjà des interactions très chouettes…
Il faudrait peut-être que je vous fasse connaître ces quelques talents que la sérendipité m’a permis de découvrir…
Et puis… et puis Galou voudra marcher et puis il faut que j’affine le programme de la semaine à venir, et puis je ne suis pas censé écrire le dimanche… et puis je fais ce que je veux.
Vive la vie !
PS : oui j’ai cru que c’était lundi, et ça me rappelle ce moment où je suis parti bosser un jour férié… et au bureau je commençai à trouver que la secrétaire et le reste de l’équipe étaient bien en retard…jusqu’à ce que je réalise mon erreur…