Vous vous êtes bien disputés

Publié le Catégorisé comme sur le vif Étiqueté
Galou sur le Causse

Oui, si j’en crois les réseaux sociaux, vous vous êtes bien disputés. N’ayant pas assisté à la fête organisée pour l’ouverture des jeux olympiques, c’était toutefois marquant de constater l’énergie dépensée dans des prises de position et des échanges souvent vigoureux et tranchés. En observant cela de l’extérieur, on aurait dit un petit théâtre où les acteurs auraient été piégés. Cela m’a renvoyé tout de même au sport, par lequel j’ai été exclu jeune et à ma conception minoritaire du sport que je partage ici.

Vous avez dit olympisme ?

Paris accueille les jeux olympiques. On entend souvent parler des valeurs de l’olympisme sans les définir jamais.

Le CIO dans sa charte en donne une définition :  » L’olympisme est une philosophie de la vie, exaltant et combinant en un ensemble équilibré les qualités du corps, de la volonté et de l’esprit. Alliant le sport à la culture et à l’éducation, l’olympisme se veut créateur d’un style de vie fondé sur la joie dans l’effort, la valeur éducative du bon exemple et le respect des principes éthiques fondamentaux universels« .

On pourrait s’arrêter sur chacun des termes tant il y aurait à lever des implicites qui mériteraient précision !

Dans sa page, Wikipédia rappelle les analyses décapantes de Jean-Marie Brohm pour qui l’olympisme est une superstructure idéologique consistant en « l’affirmation des grands principes fondateurs de la bourgeoisie impérialiste ». On a déjà perdu du monde. Il est porteur dit-il de trois grandes contradictions : l’affirmation d’un cosmopolitisme mais qui maintient les nationalismes ; l’affirmation d’un universalisme par Coubertin qui pourtant se montrait ethnocentriste, raciste, colonialiste ; l’affirmation d’une éthique exigeante mais qui est mise à mal par le dopage, la violence, le mercantilisme. L’olympisme se pose comme une « nouvelle religion » (la religio athletae de Coubertin) produisant les mêmes effets d’asservissement d’opium du peuple jadis dénoncés par Marx.

J’ai noté très peu de commentaires se référant à ce type d’analyse, même par des personnes se disant de gauche. Il est très mal vu de contester l’évènement en lui même et c’est presque un devoir que de répondre à la convocation au spectacle, en l’occurrence à distance, par écrans interposés, pour raison de sécurité.

Pour ma part je n’ai vu que des petits bouts. Je ne souhaite pas commenter. Je n’ai pas non plus envie d’aller voir.

Le sport lieu d’exclusion

Dans ma famille, le sport n’était pas pratiqué. Pas critiqué, mais il n’intéressait personne. Je n’ai trouvé aucun adulte pour me conduire vers une activité physique. J’ai appris à nager en autodidacte. C’est bien dommage.

Ce fut un maitre de cours moyen qui pour la première fois nous initia à l’activité physique moi et mes camarades. Oui avant le CM1, 0 heure d’éducation physique ! Alors mon maitre était un novateur. Il y avait le Hand-Ball, vrai sport d’équipe, la balle au prisonnier. Il nous emmenait rencontrer des équipes d’autres écoles et nous conduisait par petits groupes dans sa propre Peugeot 204 ! Nous aimions ça . On a fait aussi un peu de grimper à la corde. J’avais deux ans de moins que mes copains et pas la même force physique… première exclusion. C’était impossible de les égaler.

Dans le Sud au collège, les copains ne parlaient et ne vivaient que par et pour le foot. C’était comme une langue étrangère pour moi. Je n’avais jamais vu un match et je ne connaissais pas les règles. Timoré je devins vite « chef des remplaçants ». Personne ne m’aurait voulu dans son équipe et les profs n’ont rien fait pour aider. Le gymnase et ses vestiaires surtout furent le lieu du harcèlement, la forte connotation sexuelle qui accompagnait les moments collectifs devint vite un calvaire. Les petits machos avaient des pulsions clairement tournées vers les jeunes camarades. Aujourd’hui (peut-être) que ça finirait au tribunal. Y compris pour le prof qui faisait semblant de ne pas voir. Je pris rapidement l’activité en horreur. d’autres moments furent très durs. N’étant pas performant, par exemple à la voile, je me faisais insulter publiquement par un prof hargneux. Comment laissait-on faire ? Heureusement que j’avais mes amis du théâtre sinon j’aurais douté de l’humanité. Au lycée, à part un prof très chouette en seconde qui ouvrait l’esprit à d’autres activités, je me suis rapidement éclipsé… Apparaissant à l’appel je glissais ensuite vers le vestiaire déserté, puis je ne vins plus. Je réussis même à me faire dispenser de l’épreuve d’éducation physique au bac…

Étrangement, parce que j’avais misé sur d’autres enjeux, j’ai réussi les épreuves sportives haut la main au concours d’entrée à l’école normale d’instituteurs… mais à l’époque le concours faisait appel à la créativité plus qu’à la performance.

Ne croyez pas que je n’ai pas souffert de me trouver en quelque sorte extérieur au sport et à ses activités. J’aurais aimé un sport d’avantage fondé sur l’accueil bienveillant, l’épanouissement, l’expression, le plaisir d’agir.

Tristes disputes

Le spectacle donné par les positions qu’ont cru devoir prendre les uns et les autres, vu de l’extérieur, quand il ne traduit pas une nouvelle fois l’aptitude à l’ultracrépidarianisme, semble en réalité ne reprendre que les clivages mis en avant par les dernières élections en France.

Le président de la République dans une manipulation grossière, prétendait à la trêve, mais on peut se demander si l’une des fonctions de ce spectacle, à l’ouverture des jeux, n’était pas de piéger les gens en les contraignant à se positionner. Je ne dis pas que le metteur en scène n’était pas sincère, mais lui aussi, s’est peut-être retrouvé piégé…

On a vu certaines personnes défendre les prestations de tel ou tel artiste parce que celles-ci étaient décriées par d’autres.

Je ne veux pas entrer dans la polémique en elle-même. Je refuse d’être contraint de prendre part à la discussion. Ce que je trouve dommage, c’est toute cette énergie déployée à se diviser. Où sont les valeurs de l’olympisme là dedans ?

Hier, je disais qu’il est facile de se laisser prendre au piège du dénigrement.

La vraie question de la pratique sportive

Pour moi qui aime marcher, qui aime danser et nager et qui aurait aimé pratiquer des sports pour le plaisir, le véritable enjeu est l’accès de toutes et tous à des pratiques sportives émancipatrices, partagées, non fondées sur l’esprit de compétition ou de performance mais plutôt sur l’épanouissement, le bonheur et la santé.

La question n’est pas d’avoir de grands champions mais de donner une place populaire au sport en le rendant accessible et agréable pour toutes et tous… Contrairement aux idées reçues, c’est comme pour « les grosses fortunes », ça ne « ruissèle pas » ou pas longtemps, juste pour la mode ou le commerce des chaussures de sport (fabriquées par qui d’ailleurs ? ).

La question est de permettre par un sport inclusif et bienveillant de pouvoir partager des moments de sports entre jeunes et vieux, femmes et hommes, sans distinction. De faire du lien social sur le terrain et non d’avoir d’un côté des joueurs et de l’autre des spectateurs … Un sport de rencontres et non d’affrontement, un sport pour apprendre à faire équipe et non au service d’une star, un sport généreux mais sans cet abus de commerce et d’industrie qui le pervertit en promouvant une approche élitiste…

Mais je sais que mon point de vue est ultra-minoritaire…

Verslaveyrons
Vincent Breton

Par Vincent Breton

Vincent Breton auteur ou écriveur de ce blogue, a exercé différentes fonctions au sein de l'école publique française. Il publie également de la fiction, de la poésie ou partage même des chansons !

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