Tiens ? C’est déjà décembre ? Je ne l’avais pas vu arriver celui là. J’aime pourtant égrener les mois qui passent. Décembre reste ce mois singulier. L’hiver officiel, le dernier mois de l’année, les fêtes croyantes ou païennes, le budget qui sera voté ou pas, les gens fatigués, les virus qui trainent, les guirlandes de poncifs qui s’allument, la brume dans la vallée, les espoirs de paix, les bilans, ceux qu’on retrouve ou ceux qui manquent… mois contrasté, pas forcément le plus simple pour toutes et tous.
Dans le souffle de Galou
Sa quatorzième année, on dirait qu’il la dévore avec avidité donnant des leçons de joie, de vie et de courage. il n’a pas rechigné à faire près de cinq kilomètres hier, reniflant tout du passage des chevreuils aux traces des comparses dans les rues du village. Vaillant, mais le souffle sifflant. Joueur, mais se faisant mal au retour, patte pliée. La douleur. Mais voulant jouer encore. Profiter, profiter…
Relire Dickens ou Mark Twain
Enfant, ce mois était souvent sensible. Mais j’adorais à ce moment là, lire ou relire Dickens, Mark Twain, voire Daudet… J’aimais les histoires tristes d’orphelins pauvres pour qui Noël était une période si difficile à passer. Je lisais ça au chaud, avec un chocolat. Il n’y a rien de meilleur. David Copperfield fut un ami sacré.
Je n’écrivais pas de lettre au père Noël dont j’avais découvert l’imposture à l’âge de quatre ans. J’ai mis longtemps à ne plus en vouloir aux adultes de ce détestable mensonge, de cette manipulation méprisable de ma crédulité. Précoce lucidité, violence insigne. C’est en décembre que je perdis confiance dans les adultes. Ma chance, c’est que j’appris alors à m’émanciper de ces manipulations répugnantes pour oser tracer mon chemin et aimer qui je voudrai. Lire ce que je voudrai.
Premier dimanche de décembre
Dehors la brume enveloppe la vallée. Il fait silence. Ce n’est que le début de décembre. Tout à l’heure je sortirai le vélo. Je vous dis tout. Peut-être reverrais je le grand cormoran pêcheur devant l’éternel. Ce qui est ennuyeux c’est que je suis obligé de porter ce gilet jaune ridicule. Par acquis de conscience, je mets un casque en plastique sur la tête. J’espère juste que personne ne me reconnaîtra dans cette tenue.
Les comptes à faire, les choses à penser, les programmes, ce sera pour plus tard. Je procrastine un rien. Il y a des choses qui se dessinent.
J’ai retrouvé la chanson
Je croyais l’avoir déjà mise en ligne, on dirait que non. C’est une chanson qui a maintenant je pense au moins vingt ans. Si ce n’est beaucoup plus. J’aime bien son rythme et ces rires bizarres que j’ai collés deux fois dans la chanson. Je ne sais de quand date cet enregistrement. Je suis mauvais dans le classement de mes archives.
Sombrer en décembre
Rentre la table, il va faire froid
Mon cœur est en cendres
Mon cœur est déjà froid
Allume la lampe, je ne suis plus tendre
Je me sens descendre en décembre
Sombrer en décembre
Range les fleurs, il va geler
Que puis-je y comprendre
Je croyais pouvoir vous aimer
Ferme les volets, ne puis entendre
Je voudrais m'étendre en décembre
Tomber en décembre
Ferme la porte tu peux partir
C'est pire que novembre
La nuit je ne peux plus dormir
Je vais rester seul en ma chambre
Je voudrais mourir en décembre
Pleurer en décembre
Pas la peine de téléphoner
Si c'est à pierre fendre
Mon âme est déjà toute gelée
Voici le moment de m'étendre
Je suis déjà mort en décembre
Brûler en décembre
Place une buche dans la cheminée
Un cercueil de bois tendre
Je suis prêt à incinérer
Voici alors que je rassemble
Tous mes amis en ce décembre
Épitaphe de décembre
Lis ce poème si ta voix tremble
Il faudra répandre les cendres
Je vais vous faire voyager
Aux quatre coins de ma vieille chambre
Quatre cierges de décembre
Remords de décembre
Oui tu peux passer pour un thé
Il est urgent d'attendre
Et je vais encore hésiter
Mon autolyse peut patienter
Il y a des lumières en décembre
Sombrer en décembre
Ou bien sombrer en été
On ne peut comprendre
Qu'un fardeau soit lourd à porter
Il suffit de le déposer
Je croyais l'avoir laissé à tes pieds
Se taire en décembre
Laisser la douceur vous gagner
Sortir de la chambre
Et vers le jardin enneigé
Regarder passer son enfance
Et tout simplement pleurer !
Tiens ? C’est déjà décembre ?
On ne va pas en faire une histoire non plus. J’en ai connu des flopées. J’aurais mis deux p. À flopée. Comme quoi on apprend à tout âge.
Des flopées de décembre aux couleurs contrastées. Comme une ponctuation. Comme une chance.
Décembre, le mois qui vous prend les pieds dans votre enfance, mois contradictoire, attachant et dérisoire, désordonné et là pour regonfler discrètement la pompe à espoir.