Comment se renouveler face à l’adversité ?

Publié le Catégorisé comme changer de vie
Nuage

Depuis le début de la semaine je parle de renouvellement. Comment s’engager sur un vrai renouvellement, quels éléments peuvent guider ce renouvellement ? L’actualité vient soudain heurter et toquer à ma porte : comment se renouveler face à l’adversité, en milieu hostile, quand le contexte fait tout pour nous décourager ? Bien facile de promouvoir une évolution personnelle quand tout va mal autour…

Réagir juste

Les émotions sont légitimes et nécessaires. Les accidents par nature imprévisibles, les problèmes, les drames, peuvent venir s’opposer à nos projets, nous décourager…

Difficile de se motiver et de se sentir libre quand on voit la force de l’agressivité, le pouvoir de la violence. Mentir, tricher, disqualifier, « ça paye », « ça marche ».

Les uns se présentent et gagnent une élection malgré des ennuis conséquents avec la Justice. Obtenir la « confiance » des électeurs en insultant et balançant de fausses informations est possible. Il suffit d’avoir l’aplomb. Alors difficile de trouver l’optimisme pour se renouveler…

Anne Sylvestre chantait « L’honneur »

...
À quoi ça sert d'aimer les autres ?
Les racistes vivent mieux que nous
Les racistes un peu partout
Sous des dehors de bons apôtres
Cachent les crimes les plus fous
Dont ils se vantent peu ou prou
Ah ! Bien sûr, si c'était possible
Tolérant et puis toléré
Libre d'aimer sans comparer
Serait un bonheur indicible
Mais tolérant et tabassé
C'est ridicule et ça n'a jamais consolé


elle conclut cette chanson très pessimiste
C'est pour l'honneur
Tiens, tiens, l'honneur
L'honneur, ça se mange en salade
Et le bonheur, pauvre malade
Le bonheur, il est pour les chiens

L'honneur, ça nous fait bien rire
Mais qu'est-ce qu'on va pouvoir leur dire
À nos enfants ?

Ces accidents existeront toujours. Certains sont prévisibles…

La tentation du repli

Les uns voudraient cacher leurs émotions et « penser à autre chose ». Les autres en suréagissant ne vont que renforcer les idées contraires.

Il nous faut pouvoir considérer le monde en acceptant nos émotions, en ne banalisant rien :

  • ne pas surinterpréter car c’est déjà s’avouer vaincu
  • ne pas se laisser imprégner et ne réagir que par le négatif, résolument construire
  • ne pas s’inscrire dans les logiques mortifères, de disqualification ou de ressentiment – ce serait juste nourrir les guerres…
  • s’exprimer, affirmer ses valeurs, résister, faire preuve de solidarité

Nous sommes dans une société de la « communication » dont le paradoxe est de ne communiquer que sur les apparences à toute allure. Le cerveau peut aller se doper dans les pires habitudes. Le scandale, le buzz sont des empêcheurs de penser pour mieux nous asservir quitte à nous « faire hurler avec les loups ». Les loups je les aime beaucoup, mais l’expression montre combien le groupe (humain) peut vite se transformer en meute qui ne se rassure qu’en allant s’en prendre au faible…

La puissance de l’aspiration à la liberté

Le prix à payer risque d’être lourd… mais la puissance de la liberté c’est qu’elle est irrésistible.

Le souffle de la Liberté est irrésistible.

Sur mes cahiers d’écolier
Sur mon pupitre et les arbres
Sur le sable sur la neige
J’écris ton nom

...
Le merveilleux poème d'Éluard a été écrit en 1942 ! Qui pouvait y croire ? C'est la force incroyable du poète d'oser revendiquer et affirmer la Liberté.

La Liberté est du côté de la vie tandis que la dictature (même choisie démocratiquement) est du côté de la mort.

Il faut oser se situer du côté de la vie, de cet élan.

Si un jardinier sévère tente de supprimer ce qu’il appelle injustement « la mauvaise herbe », avec la volonté de la faire disparaître, elle reviendra toujours, d’une manière ou d’une autre. Un coquelicot peut pousser entre deux dalles de béton. La « mauvaise herbe » détestée car elle rompt l’uniformité de la pelouse domestiquée, peut fleurir et surprendre le plus exigeant. J’en ai vu tourner autour des pâquerettes soudain prises en affection…

Je suis de la mauvaise herbe, braves gens, braves gens
C'est pas moi qu'on rumine et c'est pas moi qu'on met en gerbe
La mort faucha les autres, braves gens, braves gens
Et me fit grâce à moi c'est immoral et c'est comme ça

Brassens - "La mauvaise herbe"

C’est pour l’honneur

Alors oui, c’est pour l’honneur, le vrai. Pas celui des décorations. Celui du courage qui consiste justement à se ressourcer, se renouveler dans ses valeurs.

Ce n’est pas en négociant avec le raciste, en lui concédant qu’il aurait « un peu raison » que je vais amoindrir son racisme… mais c’est en affirmant la dignité absolue et l’égalité pleine et entière de toutes et tous que je vais convaincre autrui.

Et pas seulement en le disant, mais en le faisant. Et pas en cédant un pouce de valeur à quiconque mais en m’inscrivant dans le réel de la rationalité en actes.

Il faut être ce que l’on veut que les autres soient. Faire ce que l’on pense juste. Être présent dans tous les espaces possibles du quotidien…

Militer ce n’est pas seulement en manif, c’est cheminer et incarner dans sa vie ce en quoi on croit.

C’est là qu’il y a à se renouveler. Cela peut s’entendre pour l’individue, le citoyen comme pour le mouvement politique.

Ce renouvellement là exige que l’on pense ce que l’on dit et qu’on aille jusqu’au bout avec exigence, résolution et joie. Pas en discours ronflants. En présence à soi et autrui.

Croire en soi

Si des valeurs mortifères trouvent un écho si puissant, c’est qu’elles apportent des réponses faciles grâce au ressentiment, en désignant un ennemi. L’ennui, c’est que ce n’est qu’une façon de se déresponsabiliser.

Au fond, moi qui éprouve tant de difficulté à être fier de moi parce que je déteste toute forme d’orgueil, je sais qu’il est beaucoup plus courageux d’être fidèle à des valeurs humanistes que d’exclure ou désigner des coupables.

Il ne peut y avoir de renouvellement sincère et profond si je dilapide de l’énergie à me disqualifier. Ou disqualifier autrui.

Chouiner c’est bien, agir c’est mieux

Si je me plains de ce qui ne va pas en faisant une excuse, si je tente juste de sauver mon petit jardin, mon univers… je ne fais que garantir que ça ne changera pas… et maintenir l’oppression et m’empêcher et empêcher les autres…

Ceux qui promettent vont décevoir tôt ou tard.

La question viendra vite des « formes d’action » pour soi, auprès des autres. Il faut pouvoir le faire sans dogmatisme, avec ses capacités, ses compétences…

Il ne s’agit pas de renforcer l’autre en lui donnant raison d’avoir « un ennemi »…

Il s’agit au fond que chacune chacun puisse prendre sa place. Y compris celles et ceux avec lesquels je suis en désaccord, sans qu’ils n’empiètent sur la liberté, le droit à l’autonomie et à l’émancipation d’autrui…

le pont sur l'Aveyron

Pas de conseils, de l’accompagnement…

Je ne veux pas donner de conseils. Cela ne sert à rien et peut-être reçu de travers. Je ne veux prendre de pouvoir sur personne.

Les questions que je pose, les essais de réponse … j’expérimente cela pour moi-même. C’est affaire d’éthique.

Accompagner, s’accompagner, faire ensemble, nourrir et partager la réflexion par un vrai dialogue …

Reliés

Un événement à l’autre bout du monde peut affecter ma vie. Mais ma vie est reliée à d’autres vies. Ce sont des cercles.

Si le monde est énervé, à moi d’être calme. Si les messages sont brouillés et la pensée confuse, je dois m’employer à questionner, à dire, à renouveler chez l’autre la possibilité de s’émanciper du prêt à penser en gardant allumée la « lumière »

Dans le journal d’hier beaucoup de morts
Et puis partout beaucoup de gens indifférents
Nous sommes peu nombreux à veiller
Nous tenons la lampe allumée
Nous repoussons de toutes nos forces le sommeil
Et la lampe nous fait les yeux brillants

Nous tenons la lampe allumée
Nous ne vieillissons pas

Jacques Bertin - Carnet

Alors le renouvellement devient une sorte de résolution intérieure. Le contraire d’un gadget ou d’une méthode miracle pour le bonheur. Il est une façon de laisser circuler l’air, de laisser passer la parole…

Car ce qui nous différencie des loups avec toute l’amitié que j’ai pour eux, c’est que nous disposons du langage et de la pensée.

Le chêne de super Cayrou

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Vincent Breton

Par Vincent Breton

Vincent Breton auteur ou écriveur de ce blogue, a exercé différentes fonctions au sein de l'école publique française. Il publie également de la fiction, de la poésie ou partage même des chansons !

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