Ce matin là, la chatte puis le chien, très tôt, bien avant l’aube, avaient décidé qu’il fallait se lever. La nuit était anormalement tiède pour une nuit de décembre. Quelque bête était venue jusqu’à notre porte. Le chien renifla longuement son passage. La chatte resta sur le seuil rêveuse. Qui était passé ? Quelque animal mystérieux ? Quelque fantôme ?
Ils en savaient plus long que moi. Mais ils ne montraient aucune espèce d’inquiétude ni la moindre agitation…
J’avais le sentiment qu’on venait de dérober mon rêve. Était-ce la mort qui l’avait emporté comme un drap replié sur son épaule pour masquer son squelette ? Je n’ai pas peur de la mort. La mort c’est ma mère, elle vient parfois souffler dans mon cou puis se sauve muette dans la nuit.
Je pensai alors au cheval qui vit un peu plus loin dans le pré. Savait-il ?
Tout autour, dans leurs rares maisons éteintes, les hommes dormaient, la bouche entrouverte. Inconscients comme des machines débranchées. Les femmes rêvaient telles des barques amoureuses et multicolores descendant la rivière. Le cerveau des enfants dévidait d’étranges leçons avec des chiffres dans un silence parfait.
Alors, il fallait écrire…
Avant le fil de l’aube
Avant le fil de l’aube,
Quel chat frôla la façade ?
Nous nous sommes levés
Pour goûter l’instant présent
La dernière goutte de nuit
Lorsque les morts rentrent chez eux
Avec nos songes repliés
Avant le fil de l’aube,
Un frisson de tendresse écrit :
Le cheval dort debout
Sa couverture sur le dos
Avant le fil de l’aube
Ne traverse pas le jardin
Ses mains t’appellent couvertes d’encre
Avant le fil de l’aube
Avant la première vapeur du thé brûlant
J’irai te boire demain, ma douce
Dans le creux de ta main
Tient mon roman
Avant le fil de l’aube
Nous sommes
Exactement nous-mêmes
Doux et patients
Transparents
Comme l’encre de Chine
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