Tout ce courage !

Publié le Catégorisé comme réflexions Étiqueté
le brouillard sur le Lot
©Vincent Breton

Une semaine n’aura pas suffit à faire le tour de la question du courage. De l’âme au cœur, le courage est engagement, un mouvement. Une mise en action. On n’est pas courageux par la simple pensée. Il faut se mettre en route, se dépasser. L’aventurier qui se jette à corps perdu dans le danger n’est rien qu’un orgueilleux. Les martyrs ne sont pas courageux. Ils attendent une récompense. Le courageux intègre la peur et prend le risque de se perdre mais il ne cherche pas à se perdre. Le courage est du côté de la vie, de la liberté. Il est la décision qui s’inscrit dans le présent. Il consent à l’imperfection. Le courage ne s’entoure pas toujours de toutes les précautions mais son éthique, éclairée par l’intuition, le fait aller vers le bien. Le courage peut transformer.

Protéger et résister

Face à la catastrophe, à l’accident, celui qui décide de « plonger » pour sauver la personne qui se noie, ne perd pas son temps à évaluer longuement la situation. La peur est là, il ne s’agit pas de se jeter dans une eau tumultueuse si on ne sait pas nager pour sauver autrui. Sinon c’est du suicide. Apprendre les « gestes qui sauvent » c’est savoir « se préparer à ». Il faut penser contre le réflexe de rester sur la rive, ou pire celui de faire semblant de regarder ailleurs.

Celle ou celui qui protège en a fait parfois son métier. Il s’agit de ne pas se mettre en danger soi-même mais le pleutre ne parviendra pas à avoir une action utile. Il y a ce courage en situation de crise, en urgence… Avoir appris , s’être préparé-e n’est rien face à la réalité. Être courageux c’est entrer dans le présent pour écrire l’Histoire… ou s’opposer à ce qui semble inéluctable. Le courageux est centré sur ce qu’il doit faire.

Résister suppose d’avoir analysé la situation. Il faut oser « penser contre » un ordre établi, une dictature… Il faut souvent agir alors que la liberté a déjà été confisquée, dans ce « trop tard ». Les résistants s’exposaient et s’organisaient dans l’ombre avec ténacité et patience. Il faut de la conscience, des principes éthiques, dépasser son propre égoïsme. Le « collabo » faisait le pari de se sauver seul en se mettant du côté du plus fort.

Courage et fraternité

Quand l’accident a eu lieu, il faut se prêter main forte. La situation de crise permet au meilleur de l’homme de s’exprimer. On aimerait d’ailleurs que les humains sachent anticiper et faire acte de solidarité avant qu’un drame ne surgisse. Il y a ce petit courage du quotidien qui s’incarne dans la bienveillance et l’attention à l’autre. C’est en cela qu’il faut préférer toujours la coopération à la compétition. On s’entraide, on partage, on reconstruit ensemble. Il est possible de voir alors des hommes oublier leurs petites querelles et les jalousies d’antan pour se sauver mutuellement. Il y a des choses qu’on ne peut faire seul.

On peut choisir de rejeter le migrant à la mer ou avoir le courage de l’accueillir pour lui permettre de prendre son destin en mains.

Le courage de se transformer

On peut avoir le sentiment qu’avoir le courage d’être soi ou de transformer certains aspects de sa vie, ne serait qu’un acte individuel, « égoïste ».

Pour pouvoir « se transformer » et changer sa vie, on ne peut procrastiner. Il va falloir accepter une remise en question, des efforts physiques et mentaux. Parfois il faut lutter contre soi.

Pas d’excuses à remuer le passé, pas d’excuses à vouloir attendre un futur où les conditions deviendraient enfin favorables.

Dire au fumeur qu’arrêter le tabac est pour son bien, lui permettra des économies… ce n’est pas faux. Mais c’est surtout l’amélioration de ses interactions interpersonnelles, la possibilité qu’il aura de mieux contribuer à la vie sociale qui lui apporteront du bonheur. Il faut donc que la société fasse acte de solidarité en lui faisant place.

Si l’on veut se transformer parce qu’on culpabilise, il y a grand risque de ne pas tellement avancer. Si c’est pour pouvoir prendre sa place, aller mieux, oser faire le choix du bonheur alors la dynamique sera plus forte. S’accepter pour s’affirmer sans s’opposer, c’est travailler à développer son autonomie tout en contribuant à la vie collective.

Pour cela, la société doit être égalitaire. Chacune et chacun doit être reconnu·e dans sa pleine dignité.

Le courage est un pari mais toujours du côté de l’espoir

Le courage dit une vérité qui peut déranger. À la fois, il désigne ce qui est inacceptable, insupportable (on ne peut laisser cet enfant se noyer, ce dictateur nous priver de liberté) et il ose malgré une réalité qui semble affirmer le contraire, revendiquer un possible. D’abord il faut savoir dire « Non ! » puis sans tarder surmonter sa peur, pour agir en délaissant parfois les principes « sages » de précaution. On ne reste pas en sécurité totale, il faut mesurer les risques pour agir à bon escient.

Être courageux c’est accepter l’idée qu’on ne supprimera pas les incertitudes, qu’il faudra constamment évoluer, cheminer.

Il ne s’agit pas seulement de transformer, de reconstruire, mais d’inventer pour faire mieux.

Il y a quelque chose de révolutionnaire dans le courage.

Le vrai courageux n’est pas le guerrier qui cherche à se venger mais celui qui va créer les conditions de la paix dans la dignité.

Encore une fois, une démarche courageuse, même apparemment initiée pour « se sauver », inclut toujours l’autre.

Le courage est un choix éthique et non un devoir ou un sacrifice.

Le courage est poétique

Si le courage impose d’agir prosaïquement, la décision d’agir courageusement est une décision poétique. Elle fait honneur à notre enfant intérieur, celui épris d’idéal et de rêves.

Les contes par les épreuves qu’ils imposent aux personnages, vont les conduire à devenir courageux.

Les parents du Petit Poucet sont des salauds finis. Il va tomber de plus sur le terrible ogre visiblement pédocriminel, mais il est sacrément courageux Poucet. Il ne s’encombre pas de son passé, il ne chouine pas, il témoigne d’une volonté tenace et s’il agit ce n’est pas seulement pour lui-même, c’est aussi en fraternité, en direction de ses frères. Il est en mouvement, acteur dynamique et optimiste. On voit bien que Poucet a su dépasser l’avenir bien sombre qui lui était promis, il a su s’émanciper de son passé… malgré sa petite taille, il a su développer sa volonté propre et faire fonctionner son intelligence pour surmonter le danger. Il s’accepte et ose. Quel chouette garçon !

Routevelo
Vincent Breton

Par Vincent Breton

Vincent Breton auteur ou écriveur de ce blogue, a exercé différentes fonctions au sein de l'école publique française. Il publie également de la fiction, de la poésie ou partage même des chansons !

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