Je vis en poésie

Publié le Catégorisé comme sur le vif
Mur dans Cajarc

Ceux qui suivent auront vu que le slogan du site après hésitations est redevenu « Vivons heureux en poésie ! » Je vis en poésie, pour faire un amical salut à Guillevic ou à Hölderlin, pour oser le Je et s’éloigner un peu de l’injonction stupide à la mode des coachs induite par le slogan précédent. Non pas pour mettre de côté l’idée d’être heureux. Heureux n’est pas un état statique mais un cheminement. Une démarche. Je vis en poésie, dans ce mouvement relié et reliant au réel, au présent, à la vie, à ce qui tisse ensemble le vivant et le non vivant dans ce qui toucherait ou appartiendrait à une sorte de ressenti de l’éternité. Une éternité qui n’a pour ma part pas besoin de Dieu.

Une lecture des gestes du quotidien

Hier je vous parlais de l’état de plaisir dans lequel on peut se trouver lorsqu’on s’attelle à ôter les adventices des allées. Tout à l’heure dans les gestes ménagers qui après tout pourraient s’avérer aussi rebutants, je me disais que la façon de ranger les choses, d’organiser l’esthétique et l’ergonomie de la maison est une action poétique… Poétique lorsqu’on regarde de près les objets qui sont toujours là, on prête attention à ce qu’ils sont comme à ce qu’ils symbolisent, poétique lorsqu’on apaise l’espace domestique en l’ordonnant pour favoriser de nouvelles activités de lecture, d’apprentissage ou de création… On crée par l’ergonomie les conditions de la poésie. Les uns voudront des espaces très encombrés, des cabinets de curiosité, les autres chercheront la ligne zen.

Les promenades avec le chien où il court moins vite et va moins loin, sont encore une façon de se mettre à la hauteur de son tempo, de ses élans olfactifs qui me restent mystérieux, de la façon dont il gère ses rencontres avec les humains ou les animaux. Ce qu’il donne à décrypter et le mystère qui reste, sont poésie. La question de sa fatigue, de son âge, de sa fin, ajoutent une dimension puissante au besoin de « profiter du temps présent » et d’oser en tisser un plein moment de bonheur. C’est parce que je sais qu’il va mourir que nous partageons des moments riches et attentifs l’un à l’autre… car par chance, en vieillissant sa générosité affective se développe…

Vivre en poésie, c’est encore se vivre en se plaçant dans le paysage, non par inadvertance mais en s’y insérant pleinement. Je suis là dans le bonjour de la rencontre. Dans l’échange fugace. Dans la découverte impromptue. Dans le jeu du ballon des enfants ou découvrant ce vieux monsieur qui arrose ses plantes…

Sauf quand il s’agit de jouer à chercher l’ivresse de la vitesse, le temps long, le temps lié, le temps présent habité aide à mieux entrer dans la profondeur de ce réel.

C’est vrai, je choisi mon décor. J’ai la chance de vivre dans des paysages extraordinaires.

Mur de pierres sèches sur le causse

Leur force poétique parfois me submerge. C’est parfois presque trop beau. Il faut alors un temps, allumer la télévision et voir un peu de laideur et de la vulgarité du monde !

Loin des coachs

Les coachs sont les gourous ou les prêtres modernes. Ils sont marchands de conformisme et prompts à nous asservir à leurs concepts quitte à détourner pour cela des philosophies, des sagesses, de la littérature qu’ils tordent au prisme étroit de leur doxa.

J’ai été conseiller. J’ai appris que l’on gagnait plutôt à devenir accompagnateur. Faire avec, marcher, plutôt que vriller autrui d’une verticalité parfois sympathique, souvent condescendante.

Les seuls coachs que je supporte, sont ceux qui témoignent de leurs doutes, de leurs fragilités… sans pour autant en faire l’alibi de leur manière d’être.

Si je dis ça, c’est qu’après avoir affiné la ligne esthétique du site, je veux en affiner la ligne éditoriale. Je ne suis pas là pour donner des conseils ou dire ce qui est bien.

Le collectif, le faire ensemble me plaît. Mais pas le leadership, le pouvoir sur autrui, l’ascendant. Et dans le même temps, je veux pouvoir poser un « je » d’assertivité où maintenant après un long travail, j’ose choisir pour moi ce qui me fait du bien, ce qui m’est utile dans le sens où j’y trouve élévation sans contredire mes valeurs, sans jamais insulter l’enfant intérieur.

Si quelqu’un trouve cela inspirant, on m’a dit que cela arrivait, en aucun cas il ne peut y avoir transposition. Il ne peut y avoir que réinvention…

Indépendance

Ce que j’ai le mieux réussi dans la vie, c’est ce que j’ai décidé par moi-même. Sans prendre conseil, sans l’accord d’autrui. Non sans lire, m’informer, me former, non sans le regard de mentors… mais en volonté propre, non pour me conformer à une voie tracée mais pour avancer, marcher devant, progresser, débroussailler…

Réussissant un jour un concours de l’administration, un collègue me dit : « Tu as obtenu ton bâton de maréchal ». Je n’y voyais pourtant aucune consécration mais plutôt la possibilité de débroussailler un nouveau chemin…

Et j’ai encore à faire…

PS : si vous voulez deux fois par mois au plus, recevoir la lettre d’information du site, il est facile de s’abonner. Vous ne louperez pas les nouveautés !

Par Vincent Breton

Vincent Breton auteur ou écriveur de ce blogue, a exercé différentes fonctions au sein de l'école publique française. Il publie également de la fiction, de la poésie ou partage même des chansons !

S’abonner
Notification pour

0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires