Que l’on tienne un blog, un blogue, un journal, voire un vlog selon les appellations et pratiques préférées, nous nous posons toutes et tous un jour la question : « mais pourquoi j’écris ce blog ? «
Se lancer est une chose, tenir la route en est une autre. L’écriture d’un journal sur la toile est le lieu de tous les paradoxes ou de toutes les ambiguïtés dont nombre sont inhérentes à la conception même du Web, nos représentations, notre éthique.
Les plus fidèles de nos lectrices et lecteurs auront noté que l’objet a évolué, continue d’évoluer… mais se renouveler suppose de ne pas tout déstabiliser au risque de devoir faire et refaire… et perdre son lectorat…
Cet article, outre une forme de témoignage, sera aussi une façon de faire le point…
Des millions de blogs
Les statistiques ne sont pas si claires. Il y aurait 600 millions de blogs dans le monde en 2022 selon « Blog pas cher » . Mais combien de vraiment actifs ? Un certain nombre naissent, meurent, disparaissent…
Pouvoir être reconnu-e
Celles et ceux qui recherchent la célébrité sont surtout présents sur certains réseaux sociaux avec le double risque de n’être jamais qu’une étoile filante et de se trouver soudain aspirés dans un vaste trou noir en raison de l’inanité de leur propre propos… Il n’empêche que d’aucuns rêvent sinon de célébrité, de notoriété et de se faire une place au soleil d’Internet…
D’autres encore, alléché-e-s par des coachs dynamiques et leurs promesses mirifiques rêvent même de faire fortune…
Il y a ceux qui veulent pourvoir améliorer « leur référencement naturel » et se trouver en bonne place des recherches « Google ». Celles et ceux qui ont des choses à vendre… mais on connaît la force de certaines plateformes…
Comme tous ceux qui créent quelque chose sur la place publique, je cherche forcément du retour. Et le piège du narcissisme n’est jamais loin.
Dès que l’on commence à vouloir mesurer l’audience d’un site on peut se mettre en difficulté : il faut pouvoir prendre du recul pour analyser pourquoi on a ou pas du retour… ne pas « se prostituer », ne pas se disqualifier, ajuster sans voguer au gré du vent…
Être soi et savoir lâcher prise pour se rendre disponible à la découverte d’autrui…
Ce que j’apprécie le plus de mon côté, c’est lorsque naissent des échanges, lorsque je découvre de nouvelles personnes inspirantes qui vont me permettre de nouvelles découvertes et apprentissages.
Il faut en même temps savoir « gérer » les critiques pas toujours aimables ou savoir recevoir des compliments qui peuvent sembler disproportionnés, voire … intéressés. Mais ça, c’est bien ce qui existe aussi dans « la vraie vie« .
Pouvoir répondre aux questions que les internautes se posent… ou pas
On nous dit cela fort souvent. Pour qu’un internaute nous trouve, il faut que notre article réponde à une question formulée par un internaute et que de plus nous nous trouvions avec cet article « à la bonne place », c’est à dire dans les dix premiers résultats du célèbre moteur de recherche qui continue de tout dominer…
C’est pourquoi il faut savoir jouer du bon titre, de la bonne formulation, disposer des bons mots clés et savoir les placer à bon escient, plusieurs fois dans le texte…
Vous allez rire : j’écris souvent pour répondre à des questions que les gens ne se posent pas. J’écris volontiers pour conduire la lectrice ou le lecteur dans des espaces inattendus. J’aime pouvoir surprendre. Mais pour être surpris, il faut accepter de l’être, faire preuve de curiosité, de disponibilité, de sérendipité…
Autrefois on disait que l’on butinait sur Internet… Je ne suis pas certain qu’aujourd’hui nos recherches ne soient pas plus dirigées par l’urgence. C’est de la consommation rapide. Nous n’avons guère de temps à perdre sur les pages d’un site… même si nous en passons parfois beaucoup à espionner nos propres amis sur les réseaux sociaux…
J’écris peut être pour me surprendre aussi… J’écris pour partager un cheminement, une réflexion, pas pour dispenser un savoir tout fait…
Des visiteuses et visiteurs pressé-e-s et fugaces
En examinant un peu la navigation des personnes qui découvrent le site, il y a celles et ceux qui vont ne regarder qu’une page… parfois moins d’une minute et partir … pour toujours (snif !) puis 30% qui vont rester un peu plus… et certains même visiblement « éplucher » toutes les pages du site…
Il faudrait donc savoir vous retenir la main, enfin les yeux… Cela suppose de bien construire son affaire…
L’écriture sur un blog est périssable
Si le hasard d’une recherche peut conduire un lecteur à replonger dans les pages anciennes, en général, les lecteurs vont « surfer » sur l’écume des dernières publications et sauf coup de foudre particulier et grande notoriété, un article est appelé à s’enfoncer assez vite dans les limbes…
Il faut parfois aller le remettre en avant… mais moi même je suis davantage motivé par la nouveauté que par mes anciens textes… Il faut savoir aussi retirer un texte obsolète quitte à le conserver pour un autre usage.
Écrire un blog, ce n’est pas exactement comme les pages stables du site, encore moins comme les pages d’un livre… Sauf sujet spécifique, il est rare que je revienne relire un article lu des mois en arrière. En général, si un article m’intéresse, je note une idée, peut-être j’en garderai trace, mais on passe souvent à autre chose… quitte à revenir voir le site et ses nouveautés si j’y ai lu des choses qui m’ont apporté des informations « utiles » ou qui m’ont fait plaisir…
Je ne blogue pas pour passer le temps
Je ne blogue pas pour passer le temps, ni pour me rendre intéressant comme dans les chansons… Mais alors ?
Je blogue pour pouvoir
- mieux développer mes idées que sur les réseaux sociaux
- m’interroger, creuser une réflexion, pour apprendre, chercher
- développer ma créativité
- parler de mes créations « littéraires » et en témoigner tant en termes de processus que de productions à faire découvrir
- m’affirmer sans m’opposer en osant forger un point de vue libre
- partager des valeurs (éthique, coopération, conception de l’art…)
- m’engager dans mes projets personnels et artistiques non avec la volonté de me « mettre la pression » mais pour affirmer que j’ose me lancer comme une sorte de promesse, de dynamique…
- par exemple, j’ai raconté comment je m’étais lancé dans le processus de publication du roman numérique
Ce serait ça l’idée, je blogue pour oser être qui je suis et notamment revendiquer le droit à la créativité pour toutes et tous, le fait d’être singulier mais semblable à chacune et chacun en dignité.
Je blogue pour apporter mon « grain de sable », « ma touche au tableau »…
Je blogue non pour me la ramener mais pour inviter à chatouiller notre « zone proximale de développement » comme dirait mon pote Vygotski avec qui j’étais (presque) sur les bancs de l’école primaire…
Je blogue donc je suis ?
Blogue à part, sans blogue je vis : et je dois même veiller à moduler le tempo pour que son écriture ne vienne pas se faire au déficit d’autres créations.
J’avais revendiqué l’idée d’écrire chaque jour… oui mais pas forcément seulement le journal.
Il faut prendre le temps de remplir le vase (ou la cruche) pour pouvoir désaltérer les amis qui passent. Et il ne pleut pas tous les jours.
Vive l’art subversif !
Dans le jardin de la Muse à Port-Louis, la statue l’Éclaireuse de Mathurin Moreau, si on n’en fait pas le tour, vous cachera ses fesses. Le sculpteur fut pourtant un digne édile, maire du 19ème arrondissement de Paris. Je trouve que la dame a des fesses de jeune homme. J’ai aimé qu’on laissa le jardin pousser librement. Qu’on ne s’y méprenne, la gendarmerie veille à deux pas.
Oui, il faut que ce blog ose aussi un peu… montrer ses fesses ?