Voulez-vous écrire avec l’intelligence artificielle ?

Publié le Catégorisé comme réflexions
Nuage

Découvrant parait-il les articles de mon site , un quidam me propose de faire écrire mes articles grâce à l’intelligence artificielle. Voulez-vous écrire avec l’intelligence artificielle ? Il a pour ça une offre avantageuse et à ne pas manquer, payable en mensualités en n’oubliant pas le code promo. C’est imbattable. Gain de temps assuré ! Productivité accrue ! Promesses de célébrité et d’efficacité ! Refuser une telle offre serait fou !

Peut-on lutter contre le progrès ?

Il faut dire que les médias et les politiques semblent acquis à la cause. C’est assez étonnant pour un journaliste de faire la promotion d’un système qui a déjà prévu de se passer de lui. Il y a de l’argent à gagner. Mais peut-être pas pour tout le monde !

Hier j’entendais comment une lycéenne rédigeait sa dissertation grâce à l’intelligence artificielle. Des étudiants écrivent leurs mémoires avec cet outil… Des romans écrits avec l’intelligence artificielle sortent déjà, illustrés par des images produites avec cet outil.

Quelle fierté peut-on retirer de cette façon de faire ?

image générée IA
image moche générée par l’IA

Au passage, pour « ‘illustrer » mon propos, découvrez cette image. J’ai demandé à l’IA : « un écrivain rêveur près de sa petite maison dans la montagne ». Ça m’a généré cette image au format png de plus de 8002 ko (c’est lourd en échanges de données !) que j’ai dû modifier pour la laisser sur le site. Il y a peut-être une silhouette appuyée à la façade, mais dur d’y voir un écrivain… La maison est tout de même laide à mourir et la composition évidemment convenue…

Est-il ringard de dire prudence avec l’apparence du progrès ?

Nous avons pourtant l’expérience de l’agriculture extensive et polluante, de l’industrie et de ses dégâts, de la mainmise des géants du Web sur notre vie privée, sans compter l’ubérisation… On pourrait aussi parler de la société de la « post-vérité » qui a permis à un clown ayant quelques soucis avec la Justice de son pays (litote) de redevenir chef de la première puissance mondiale en s’associant à un milliardaire plus que problématique.

Mais ce ne doit pas être suffisant pour mobiliser les consciences.

Je lis avec bonheur de saines réactions comme celles de la Quadrature du Net ou de Pliskine Robert. Il est étonnant que les relais sur ces questions soient si faibles et la complaisance si grande.

Intelligence ?

Le sucre de synthèse n’est pas du sucre. Il fait pourtant grossir et l’on s’inquiète de certains composant cancérigènes.

L’intelligence artificielle, c’est une super mémoire, un gros aspirateur, un avaleur de ce que lui donne le net qui avec des calculateurs certes prodigieux peut produire des ersatz plus ou moins cohérents.

J’avais pu obtenir ma biographie via l’IA qui avait cerné que j’écris sur le Web ou que j’avais été inspecteur dans l’enseignement mais prétendait que j’avais été inspecteur dans le domaine des lettres (non) et que j’avais exercé en Alsace ! Sauf que non plus. Passons sur le style. Les occurrences qui avaient nourri le texte soit reposaient sur des déductions erronées suscitées par les contenus en ligne (j’écris de la fiction donc je devais être inspecteur dans la discipline des lettres), soit mélangeaient les choses en m’affectant en Alsace (je connais un inspecteur en breton qui avait exercé antérieurement en Alsace… mais je ne sais si c’est la source de l’erreur…).

Les quelques textes que j’ai pu lire rédigés par l’IA se reconnaissent souvent à leur phrasé. On dirait une mauvaise traduction d’articles américains. Surtout, ils sont conformistes dans la forme comme dans le fond.

Pour moi, une intelligence doit être être capable de « penser », de créer autre chose qu’un texte fait pour fait plaisir à celle ou celui qui formule une demande. Une pensée doit savoir « penser contre elle-même », accepter la remise en question. Il n’y a pas d’esprit critique possible et je m’interroge d’ailleurs sur la façon dont les algorithmes pourraient estomper les aspérités au point de ne servir qu’une liqueur fade loin de tout risque de polémique… Derrière l’application, ce sont des hommes (peu nombreux) appartenant à une organisation ou un système qui fait des choix. Je ne suis pas certain que la volonté soit de favoriser notre émancipation ! Il s’agit plutôt de trouver des consommateurs « fidèles »… Ce n’est pas du complotisme. Il faut beaucoup d’argent pour structurer l’IA. Et comme d’habitude la plupart des pays vont courir derrière les géants américains…

Couteuse énergie

L’intelligence artificielle coûte cher. Il faut des ressources énormes. Il faut stocker, faire circuler de l’information, disposer d’infrastructures qui n’ont rien d’écologique ! Entre les quasi esclaves affectés à la production des minéraux rares et les petites mains affectées à la recherche de données… il y a de quoi s’indigner.

Le journal l’Humanité le disait déjà il y a un an : Toutes les 50 requêtes, un litre d’eau est nécessaire pour refroidir les centres de données nécessaires à ChatGPT. Imaginez donc les ressources naturelles déjà englouties par les 180 millions d’utilisateurs de cette intelligence artificielle, un nombre en augmentation constante.Les calculs du chercheur néerlandais Alex de Vries, qui avait consacré sa thèse à la consommation énergétique du bitcoin, sont alarmants. Les systèmes d’IA consomment ainsi autour de 100 térawattheures, soit 0,5 % de la consommation annuelle mondiale d’énergie, l’équivalent de celle d’un pays comme le Danemark ou le Maroc. Et ce n’est pas près de s’arrêter.

Choisir son camp

Dans son format actuel, l’intelligence artificielle est dangereuse culturellement, mauvaise socialement, mauvaise écologiquement.

Les quelques utilisations faites par exemple en médecine, ne peuvent que constituer des aides à l’interprétation et se montrent incapables d’inventer des solutions, de faire des découvertes et encore moins de faire preuve de sérendipité. Le risque est grand qu’un expert humain ayant fait un vrai parcours d’études et de recherches ne se soumette à une décision lui échappant. Pour bien agir, je dois comprendre ce que je fais, ne jamais n’être qu’un simple exécutant.

Il serait terrible de voir demain une classe sociale, un « happy-few » encore plus resserré, disposant des outils critiques, de l’accès à la connaissance et une population n’ayant accès qu’au produit de synthèse, vouée à ne plus disposer d’outils de pensée critique ou de création originale.

Le conformisme porté par l’intelligence artificielle, est une forme de totalitarisme. Sous prétexte de rentabilité, d’efficacité, de gain de temps, son objectif est que la société se passe de ses créateurs, de ses innovateurs… tout en maintenant la population dans ce jus préfabriqué, sorte de Mac Do de l’intelligence…

Alors oui, il est venu le temps de choisir son camp…

Et franchement, si mon site était écrit par l’IA, je ne verrais pas l’intérêt de le maintenir. Écrire est un besoin vital et ma liberté.Pas touche !


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Vincent Breton

Par Vincent Breton

Vincent Breton auteur ou écriveur de ce blogue, a exercé différentes fonctions au sein de l'école publique française. Il publie également de la fiction, de la poésie ou partage même des chansons !

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