Il y a bien longtemps que je suis mort

Publié le Catégorisé comme au fil de l'eau Étiqueté
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"Children Living Camp Weedpatch and" by U.S. National Archives/ CC0 1.0

Oui, il y a bien longtemps que je suis mort…

été 2023 du côté du Morbihan

Il faudrait te purger mon cœur
Comme un vieux radiateur
Mon corps, c’est le même que je traîne
Depuis toutes ces années
Tant de mains y sont passées

Palinodies, je maudis ce que je m’étais dit

Tu as pleuré dans ta chemise
Elle est mouillée !
Tu as beau dire que c’est l’averse

Ou l’inverse de ton désir 

Mon sang est plus rouge que jamais 
C’est le même sang
Sur la chemise blanche
Du temps où j’étais enfant 

Et je frôlais la mort 
En courant dans les allées du jardin 
Ou bien au bord de la falaise des mensonges 

Je suis mort fusillé, un large trou à la poitrine
Ce baiser que tu ne m’as pas donné

Je suis mort sur la pelouse rouge de notre amour 
Un soir d’été

J’étais jeune, j’étais passionné
C’était avant les grandes épidémies
C’était avant ton suicide
C’était avant les orties 
Que l’on ne ferme mes veines
Avant que j’aie de la peine
Avant que le miroir ne me renvoie
L’image dégueulasse de mes traits dévastés

Avant Dorian Gray
Avant la cohorte des curés
Avant les sacrifices inutiles 
Avant les arbres couchés 

Mon cœur, il faudrait que je le rince 
Au robinet ivre du jardin 
Au grand tuyau d’arrosage 

Ou bien, que je le brûle dans tes mains fillette maudite
Toi qui m’enfanta entre les ronces d’une vie éparse 
Toi qui me jeta hors de tes jambes
Chiot saignant
Honteux 
Haletant sous la soupente métallique de l’atelier
Où la meule feulait ses étincelles 
J’étais ce couteau 
L’expulsé

Il faudrait une bonne saignée à mon orgueil
Un arrachement du cœur entre les mains du boucher amoureux

Il rit, celui là, les mains ensanglantées, levées vers le soleil 
Il rit, et lèche ses doigts de mon sang au goût de fer
Et de poussière

Il faudrait le purger ce cœur dit le plombier débonnaire
Il n’y a plus rien à en tirer répliqua le boucher 
Il a bu trop d’eau de cadavre
Il a lapé dans les eaux fatiguées du Choléra

Je suis mort une bonne fois pour toute
Il faut cesser d’écrire pour laisser croire aux autres 
Que je bougerais encore

Je suis mort
Pour toi
Et pour toi
Et toi

Tralala 

Il y a bien longtemps que je suis mort 
Tu le sais déjà
agapanthes du jardin

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Vincent Breton

Par Vincent Breton

Vincent Breton auteur ou écriveur de ce blogue, a exercé différentes fonctions au sein de l'école publique française. Il publie également de la fiction, de la poésie ou partage même des chansons !

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