Le Panache… pas si convenu

Le Panache… pas si convenu. Des critiques un rien aigris ont reproché au film une facture classique ou ses références appuyées au fameux « Cercle des poètes disparus » . Les bons sentiments c’est toujours plus risqué que la méchanceté. Pourtant, à l’heure où l’on parle par exemple du harcèlement, de la différence… il peut être une belle illustration et nourir l’intérêt en particulier des enfants et des ados. Ici, leur jeu est à la hauteur et avec naturel ils incarnent à merveille des destins auquel il est possible de s’identifier.

« Le bégaiement ça donne un charme »

Ce sont quelques unes des paroles de Joachim Arseguel invité avec la réalisatrice Jennifer Devoldère à répondre aux questions du public lors du festival Atmosphères.

Une des personnes du public évoqua l’orateur grec Démosthène dont on raconte qu’il était bègue et s’était soigné à force de s’entraîner à parler avec des cailloux et un couteau dans la bouche. Joachim ne le connaissait pas ni son histoire mais son grand père l’aurait su. Gérard Arseguel était poète, il nous a laissé une très belle œuvre et fut… mon professeur de grec ancien. Et je me souviens encore lorsqu’il déclamait des vers sur l’estrade…

Il aurait été fier. Joachim qui n’est pas sans lui ressembler fut choisi immédiatement pour le film. Poussé par son orthophoniste, il a été coaché et a travaillé son rôle au point où la réalisatrice l’a vu en véritable acteur.

Théâtre

Le théâtre est au cœur du film, lequel est l’adaptation d’une pièce. L’ombre d’Edmond Rostand se déploie également avec générosité et il ne faudrait pas oublier comme une mise en abîme notre ami Cyrano… et le choix des tirades…

Il avait été question un moment que le théâtre prenne une place forte au collège. Il ne soigne pas le bégaiement, mais il soude, relie, ouvre… Voyant cette petite troupe d’adolescents avec leur prof, même si nous étions plus autonomes, j’ai pensé forcément à mes années collège et lycée où nous nous retrouvions pour former notre petite troupe avec celles et ceux qui étaient à l’aise, et celles et ceux qui l’étaient moins… Le théâtre c’est salvateur !

Un peu trop sage ?

Si la mise en scène ne fait ni effets ni esbroufe, la caméra s’attache aux personnages. Que certains soient tracés à gros traits pour s’en moquer un peu est de bonne guerre… mais il n’y a pas de méchanceté. Ils sont attachants et plutôt crédibles.

Le père du jeune gay qui fait courageusement son coming-out en jouant le rôle de Roxane va claquer la porte du spectacle. Tout n’est donc pas résolu comme on le ferait dans une sirupeuse comédie américaine. Tom Meusnier campe avec conviction cet adolescent dont la différence est aussi complexe à vivre que le bégaiement. À l’instar de Joachim Arseguel, voilà un autre talent en herbe. Notons sur nos carnets comment ces deux là évolueront plus tard mais je pense que « le virus » a pris…

Parmi les sentiments déroulés au long du film, la valeur cardinale de l’amitié désintéressée prend toute sa force dans les relations que construisent les deux personnages…

Parmi les seconds rôles Vittoria Scognamiglio campe une truculente grand-mère qui la clope au bec et le verbe italien aux limites du stéréotype sait allier sa troupe familiale… Un peu de liant ne fait pas de mal…

On a besoin de bons sentiments et de valeurs

N’en déplaisent aux réactionnaires qui ne supportent pas en réalité qu’on mette en exerce les différences et promeuve la tolérance, nous avons aussi besoin de films accessibles au grand public, faits avec cœur, avec sincérité et sans racolage. Le cynisme est un poison toxique. Et c’est bon de voir un film qui assume pleinement son humanité avec moins de mièvrerie qu’on pourrait le penser.