Les personnages du roman côté lecteur, côté auteur

Publié le Catégorisé comme publier un livre numérique ou e-book
fontaine

Lecteur, je m’identifie aux personnages, c’est banal ou en tout cas, je les vis de l’extérieur en m’y attachant, m’y retrouvant, peut-être les aimant ou les détestant. Si l’auteur m’influence, j’interprète à ma façon. Les personnages des romans peuvent ouvrir l’esprit comme le conte entendu enfant éclaire à sa façon mais sans dogmatisme. Je peux fermer le livre, rêver à eux sans souffrir « vraiment », revenir vers eux pour savoir ce qu’ils deviendront… Ils sont comme un élargissement… mais ils restent à distance… Ce ne sont pas des personnes.

Lorsque j’écris, j’apprends les personnages de l’intérieur. Même si j’ai décidé du scénario, je les visite à l’intime ma propre mémoire, je les analyse et les ressens du dedans, en apparence. Car il y a aussi la façon dont ils s’emparent de moi. C’est à dire, que je ne deviens alors que le secrétaire de leurs émotions, de leur logique. Le marionnettiste qui croyait manipuler ses personnages est conduit par eux. En apparence aussi. Eux alors sont là pour désigner en moi ces points obscurs, les éclairer, les révéler dans une analyse qui peut s’avérer cruelle. Jeu de clés et de serrures dont les combinaisons secrètes peuvent soudain mettre à jour cette part obscure que l’on porte en soi, malgré soi… mais tant qu’ils ne sont pas libérés et donnés au lecteur, ils restent à ma main, tapis dans le tapuscrit.

Des fenêtres qu’on ouvre…

Je ne sais pas si c’est cela que l’on peut dire. La lecture vient parfois toucher des zones d’ombre, des parts secrètes en nous. On se reconnaît dans la réaction ou l’attitude de tel ou tel personnage. On peut garder distance. C’est à dire s’identifier à des degrés divers. Aimer ou détester Julien Sorel, le Petit Prince… C’est un récit, c’est une histoire. On ose se trouver un allié dans le ressenti des choses. Alors, je ne suis pas le seul à avoir ce type d’émotions, d’espoirs, de peurs… Ou bien, comme une note jamais entendue, un accord nouveau, un parfum, une association de couleurs, il y a cette évasion qu’autorise l’auteur. L’aventure. Cette apparence d’évasion car on peut lire des romans de voyage sans jamais voyager… on peut aimer à travers un personnage sans jamais aimer… Lire délivre mais ce n’est pas (vraiment) vivre ! (Mais seuls les vivants lisent). Pourtant, ce sont des possibles. Des libertés. Le lecteur fait moisson de vies à oser. Il choisira la sienne, s’il peut. Ou de contre exemples à ne surtout jamais vivre. Le lecteur joue, essaie des vies sans risquer la sienne. Il gardera le libre arbitre à la fin. Il sera juge de ces vies et pourra ou pas faire évoluer la sienne…

Et ces personnages, façonnés par l’auteur, ne sont rien sans la réécriture-lecture du lecteur…

Des clés parfois trompeuses

Le lecteur tente parfois d’aller chercher dans le roman, des allusions, des éléments de la vie de l’auteur. La biographie cachée. Mais ce n’est pas ça le plus important et ce n’est souvent qu’un leurre. Y compris pour l’auteur qui se lit lui-même.

Lorsque j’écris la vie de personnages, il ne faut pas écrire pour flatter le lecteur et lui donner les personnages qu’il attendrait pour des rêves de pacotille. Mais pourtant, je dois lui donner des personnages qui accrochent, qui susciteront une histoire ou une non-histoire mais ce ne sont pas seulement des figurants muets…

Les personnages, je vais les chercher en moi. Pas seulement dans la vérité de souvenirs passés. Ils se dessinent. Ils se sculptent. Ils s’imposent parfois malgré moi. Ce faisant, ils vont me parler à moi même et me surprendre…

À moins de les enfermer dans des modèles tout faits, il y a ce moment où ils vont me révéler une part d’eux mêmes, ce trouble et me faire comprendre ce trouble que je portais en moi.

Mais les personnages sont d’encre et de papier, pas de chair.

L’auteur n’a heureusement pas vécu tout ce que vivent ses personnages. Il est dilué à des degrés divers dans chacun d’entre eux. Entre part glauque et poétique, entre désirs et refus. Entre proximité et éloignement. C’est comme ce point dans la chair, ce nœud dans les muscles, je ne savais pas que c’était douloureux. Ça fait mal.

Celui qui écrit ne joue pas les personnages. Il les imagine et les décrit assez clairement pour que le lecteur puisse en faire quelque chose. Les personnages seront abandonnés par l’auteur, comme un don, pour sa propre libération.

L’épreuve de l’écriture

Si j’écris ça, c’est qu’avec le roman que j’écris en ce moment, la douleur, ce n’est pas celle de l’écriture en tant que telle. La technique reste à sa place. Le style, je ne sais pas s’il existe. Difficile à dire. Non, la douleur vient des personnages, de ce qu’ils vivent, de ce qu’ils ressentent et se disent.

Et de ce que cela nomme et révèle…

Sans déflorer, il y avait ce matin pour ce personnage qui ne devait pas être le héros du roman mais qui le devient peut-être, la question d’un viol subi. C’est terrible de raconter cela. Des lecteurs s’y retrouveront peut-être. Et d’avoir écrit ce passage, je ne sais pas quel est le partage entre la libération de l’avoir dit et la douleur de le vivre ou revivre avec toute l’ambivalence des sentiments… Écrire vrai sans prêter au voyeurisme. Décrire en gardant la pudeur. Oser en restant en retrait… ça c’est l’histoire et la façon d’enchaîner les évènements. Le tempo. Mais la dessous, il y a le personnage et la proximité. La description des corps. Pas simple.

Tu écris ça, après, il faut aller tranquille faire tes courses. Bien sûr c’est juste des mots sur une page… on garde la distance. La plume peut se retenir. Mais ce que je veux dire simplement, au delà de l’épisode en tant que tel, c’est que je suis étonné de voir à quel point l’écriture peut secouer marquer et colorer une journée ensuite.

Je n’en suis pas au premier texte mais c’est plus intense encore aujourd’hui.

à demain !

lectrice

Par Vincent Breton

après avoir travaillé dans l'enseignement, je consacre une bonne part de mon temps à l'écriture. Je m''intéresse à l'idée de changer ma vie grâce à la poésie. J'écris un journal, de la fiction, de la poésie et des chansons.

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